
TRANSMISSIONS
Recueil de nouvelles
Lu par Barbara DELLA VECCHIA
Barbara DELLA VECCHIA
J’ai proposé la lecture du « Cadeaux des jours Heureux » à mon amie Barbara Della Vecchia pour apporter à ce texte une note encore plus italienne à ce texte. Elle connaît parfaitement la région où se déroule l’histoire et m’a confié qu’il n’est pas rare que les habitants des Marche fassent de tels cadeaux !
Elle est née en Italie, berceau de l’art, de la culture et de la passion. Son voyage a commencé dans ce pays riche en histoire et en traditions. Cependant, la quête de nouvelles opportunités professionnelles l’a amenée à émigrer en France.
Cette décision a été le point de départ d’une aventure passionnante.
Elle est une âme créative et curieuse, toujours en quête de nouvelles expériences. Son esprit déborde d’initiative, et elle adore relever de nouveaux défis, comme celui de lire un texte destiné à vous, mes auditeurs. La France l’a accueillie à bras ouverts, et elle s’est immédiatement éprise de la langue française et de sa culture, mais sans oublier ses origines et son délicieux accent !
Le cadeau des jours heureux (texte)
Le cadeau des jours heureux
En Italie, dans la région des Marches, se trouve la belle ville historique de Jesi, où Francesca fête ses dix-sept ans. Elle reçoit de son oncle, un cadeau extraordinaire. Persuadé qu’elle a déjà dix-huit ans, et donc qu’elle va bientôt passer le permis de conduire, il lui offre la clef d’une splendide voiture : une Mercedes 280 SLK rouge grenat. Dans un an elle prendra elle-même son volant et elle imagine avec délice comment patienter.
D’abord avec Marco, son petit ami. Un peu plus âgé qu’elle, il est passionné de vitesse ; il se fera un plaisir de lui faire découvrir la puissance de ce bolide. Ensuite avec Peter, un Américain venu à Jesi perfectionner sa technique du fleuret, à qui elle aimerait bien faire découvrir les petites routes de la région.
Marco et Francesca se connaissent depuis l’enfance. Comme de nombreux enfants de cette ville très sportive, ils ont pratiqué l’escrime dans le célèbre club « Scherma Jesi », puis elle s’est lassée, alors que lui est devenu un épéiste de haut niveau. Sa fougue et son énergie conviennent parfaitement à la belle Allemande. La conduite de Marco est nerveuse et rapide, il s’imagine en train de piloter une voiture de course et son style viril ne ménage pas sa passagère qui ferme souvent les yeux et se cramponne à son siège. Il peut faire rugir le « six cylindres », crisser les pneus, Francesca se laisse aller, sans jamais lui reprocher quoi que ce soit. Il aime la vitesse, adore rouler sur l’autoroute pour profiter des deux-cent-trente-et-un chevaux de la Mercedes. Francesca ne lui dit rien de sa peur, elle reste callée dans le siège baquet et attend qu’il la reconduise chez elle pour l’embrasser tendrement. Elle se laisse faire, flattée de plaire et encore innocente.
Lorsqu’elle propose à Peter de conduire lui aussi sa belle voiture, il lui demande où elle aimerait aller, quel village reculé elle voudrait visiter. Elle ne veut rien d’autre qu’être avec lui. Seulement avec lui, embarqués pour un voyage bien plus long que la distance parcourue pourrait le laisser penser, dans un vaisseau qui la transporte hors du temps et de l’espace. Il savoure le plaisir de rouler au doux soleil d’octobre, au milieu des vignes, tout juste vendangées. Sa conduite est souple et sûre, il pose à peine ses doigts fins sur le volant, le passage des rapports se fait en douceur. Il utilise à la perfection la puissance du moteur pour épouser les ondulations de la route. Parfois au détour d’un virage, et ils sont innombrables dans cette région, Francesca laisse aller sa tête sur l’épaule de son chauffeur. Peter ralentit alors pour faire durer ce moment, laisser les cheveux de son amie lui caresser le visage, puis, un stop, une légère bourrasque, un virage contraire, sort Francesca de son abandon et la route se poursuit, comme si de rien n’était.
Marco propose à Francesca de l’accompagner le week-end lors des tournois d’escrime. En fermant le toit de la SLK, il y a juste assez de place dans le coffre pour emporter la housse volumineuse contenant sa tenue et ses épées. Si au début, Francesca est impressionnée par la vitesse à laquelle Marco se déplace sur la piste, la concentration qu’il arrive à garder pendant des heures et l’ambiance électrique de certains assauts, elle s’ennuie au long de ces interminables journées, enfermée dans des gymnases, durant lesquelles Marco n’a pas une minute pour elle.
Il est qualifié pour les Championnats du Monde et doit s’absenter trois semaines.
Avec Peter elle savoure chaque trajet comme un moment précieux. Ils sont seuls dans la Mercedes et éprouvent ensemble le plaisir nouveau que procure la voiture de luxe. La sellerie de cuir rouge est à la fois délicate et parfaitement confortable. Sur le chemin du retour, le soir, Peter allume la radio, comme pour prolonger la fête. Son visage éclairé par les phares des autos croisées sur la route apparaît à Francesca comme celui d’une star sur un écran de cinéma. Quand le froid est trop vif, il suffit de refermer le toit électrique Vario, inspiré de la Peugeot 402 Eclipse des années trente. Le silence se fait alors dans l’habitacle et les sièges chauffants font complètement oublier la température extérieure. Peter, participe à très peu de compétitions. Il est en Italie pour apprendre les secrets du fleuret et se perfectionner avant de rentrer en Amérique. Il est donc plutôt disponible. A ce petit jeu, la relation entre la jeune Italienne et l’étudiant américain évolue lentement vers un peu plus d’intimité et il n’est pas rare que Francesca prolonge avec lui les sorties bucoliques en Mercedes.
Il doit lui aussi s’absenter quelques jours, pour passer un diplôme d’Italien à la Sapienza de Rome.
Marco revient des championnats du Monde médaillé et débordant d’énergie. Il reprend ses virées rapides sur la E 55 pour conduire Francesca dans des criques isolées du parc du Conero. Ils y passent de longues heures à écouter les vagues rouler les galets. Sur le chemin du retour, elle frissonne à ses côtés, partagée entre le plaisir et la peur.
Francesca aime beaucoup que ce cabriolet soit conçu exclusivement pour deux personnes. Il devient petit à petit le lieu de sa nouvelle intimité. Marco, Peter. Peter, Marco ; elle veut éprouver ses sentiments en se laissant conduire.
Elle ignore tout de la relation entre Marco et Peter ; parfois, alors qu’elle est au lycée, les garçons partent ensemble, avec le cabriolet de Francesca, sur la route de Rome. Ils chantent à tue-tête les chansons de Bruce Springsteen ou de David Bowie que Peter apprend à Marco.
Marco et Peter sont ce soir à la terrasse de leur bar, le Servadio, sorte de repère du groupe plus ou moins informel d’amis de leur âge. Peter évoque avec délice sa découverte des ruines antiques visitées à Rome tandis que Marco raconte avec malice ses nombreuses victoires contre les épéistes français.
Ils sont tout à la joie de se retrouver lorsque Francesca les rejoint au bras d’un homme qu’ils ne connaissent pas. Elle aussi, semble heureuse de les voir et de leur présenter Andrea, son moniteur d’auto-école !
Lu par Hector MANUEL
Hector MANUEL
Hector Manuel naît à Oullins.
Il étudie au Conservatoire régional de Strasbourg
et entre à l’École du TNB en 2012 (promotion 8).
Avec BAJOUR, il est scénographe et acteur dans Un homme qui fume c’est plus sain, joue dans À l’Ouest et sera dans l’Éclipse, et a mis en scène L’Île.
Il a joué dans Songes et Métamorphoses de Guillaume Vincent et dans Le Ciel, La Nuit et la Pierre Glorieuse de La Piccola Familia au festival d’Avignon 2016. Il joue également dans Tout le monde ne peut pas être orphelin de Jean-Christophe Meurisse et Que ma joie demeure de Jean Giono mis en scène par Clara Hédouin.
Au cinéma, il apparaît dans Oranges sanguines et dans Les Pistolets en plastiques réalisés par Jean-Christophe Meurisse.
Première fois (texte)
Kevin se réveille avec la boule au ventre. Quelle nuit de merde ! Il sort de la caravane et rejoint ses frères qui sont déjà autour de la table du petit déjeuner. Anthony et Yohan ont enfilé leurs combinaisons d’entrainement, les manches défaites, attachées à la taille. « C’est à c’t’heure qu’tu te lèves ? » « On est à la bourre » « Et fais gaffe, pas de café ce matin. Ça énerve ! »
« Mais y vont pas me lâcher ? J’le sais que j’suis à la bourre. J’suis prêt. C’est pas eux qui vont m’dire si j’suis prêt. »
Kevin est un peu nerveux. Il faut dire qu’aujourd’hui il va faire sa toute première cascade en solo. Pas sa première cascade. Sa première en solo. A six ans déjà, il faisait le « singe » dans la voiture de son père ; pour stabiliser la voiture dans le numéro de l’équilibre sur deux roues. Son père, Rolland, prenait son élan sur un petit tremplin et grâce à un habile coup de volant, il mettait la voiture sur deux roues. Kevin saluait la foule par la vitre ouverte côté passager. Ça marche toujours le coup du gamin qui sort de la voiture avec un sourire d’ange et un petit casque sur la tête. A huit ans, il pilotait la mini moto pour faire des mini-sauts de cinquante centimètres sur un tremplin rouillé qui avait déjà vu passer trois générations de « Voltigeurs Volants »
« Voltigeurs Volants » c’est le nom trouvé par son grand-père. Il dit toujours « Au volant, on est les rois de la voltige ! » Dans le cirque de ses propres parents, la voltige se faisait à cheval. Mais ça, c’était avant. Maintenant on dresse des chevaux vapeur !
Ensuite, il avait surtout servi de comparse pour les numéros de ses frères et parfois encore, de son père ; Debout sur le toit d’une voiture en marche arrière ou sautant d’une voiture à l’autre dans un numéro de duettistes mis au point par ses frères. Mais à bientôt seize ans, il était temps de montrer au public ce qu’il savait faire.
Kevin rejoint ses frères pour l’ultime répétition. Il va conduire une BMW 635 i. C’est sa voiture. Il l’a reçue en cadeau pour ses quinze ans et il s’en occupe comme il prendrait soin d’un cheval. Il en connaît toutes les parties, tous les secrets. Il a plusieurs fois démonté le moteur et la boîte de vitesses. Il la connaît intimement. Une fois « domptée », elle a reçu la livrée des Voltigeurs Volants ; peinture orange, toit blanc et une énorme étoile bleue sur le capot.
C’est avec elle qu’il a mis au point un numéro unique. Numéro qu’il va présenter pour la première fois dans quelques heures au public de Tonnay-Charente sur le parking du Super U. Il lui a fallu des heures et des heures de répétition, d’entrainement, de réglages pour le mettre au point. C’est une variante du numéro d’équilibre qu’il faisait enfant avec son père. La base est relativement simple ; il faut bloquer le différentiel et surgonfler les pneus à trois ou quatre bars. Ensuite il faut disposer d’un petit tremplin, et de beaucoup d’entrainement. Beaucoup. C’est une technique apprise par son grand-père, quand il était assistant de Jean Sunny*, dans les année soixante. Mais Kevin voulait faire mieux, faire plus. Il avait déjà vu des numéros d’équilibre à plusieurs voitures côtes à côtes ou qui se suivaient sur une route ou un circuit. Ses frères arrivaient à immobiliser leurs autos sur deux roues et repartir sur quelques mètres avant de se poser sur les quatre roues. Mais lui, voulait entrer dans l’Histoire de la cascade automobile.
Pour ce dernier entraînement qui est plutôt une sorte de répétition générale, toute la troupe découvre le parking du supermarché. Il faut repérer les poteaux d’éclairage, les zones de stockage des caddies et choisir où le public sera installé. Ça, c’est le travail des femmes ; Chantal, la mère et Vanessa, la sœur de Kevin. Elles savent choisir l’orientation par rapport au soleil, où installer les paravents pour masquer la vue aux resquilleurs, et surtout, où placer la buvette.
Le parking est plein de graviers. Tout le monde passe le balai. C’est indispensable pour la sécurité et c’est un excellent échauffement musculaire.
La répétition peut commencer ; séances de dérapages, avec une, deux et même trois voitures, équilibre à une, puis deux voitures, toutes des BMW 635 i orange avec le toit blanc et une énorme étoile bleue sur le capot. Ensuite il y a la culbute ; Kevin grimpe sur un immense escabeau de plus de deux mètres de haut qu’Anthony renverse à pleine vitesse provocant sa chute. C’est spectaculaire, mais assez facile à faire. Il faut bien sauter juste avant l’impact et se réceptionner en douceur. Il y a aussi le numéro d’évitement où la voiture de Kevin, après avoir fait un dérapage devant le public, poursuit sa route en marche arrière pour se retrouver en bout de piste et repartir aussitôt face aux BMW de ses frères qui s’élancent côte à côte face à elle. L’accident semble inévitable lorsqu’au dernier instant les deux « méchants » s’écartent pour laisser passer Kevin, puis les trois voitures dans un immense nuage de poussière exécutent un tour complet sur elles-mêmes en dérapages parfaitement synchronisés.
Les numéros suivants sont répétés « à blanc ». Le mur de feu avec Anthony au volant et Yohan agrippé sur le toit, le saut de dix mètres avec atterrissage sur des carcasses de voitures récupérées à la casse du coin et enfin leur destruction avec un « Monster truck » dans lequel dix personnes du public pourront monter. Il reste le numéro de Kevin, qui sera le clou du spectacle. Alors qu’il s’installe dans sa 635 i, son père interrompt brutalement la répétition. Il y a une panne de courant. Les groupes électrogènes ne fonctionnent plus ! Sans électricité, pas de spectacle et… pas de buvette. Mobilisation générale. Kevin est le seul membre de la famille qui a fait des études de mécanique. Il lui faut deux minutes pour identifier la panne, mais plus de trente pour réparer. Il est maintenant treize heures, il faut tout remettre en place. Manger en vitesse et se garder vingt minutes pour une mini sieste.
Quatorze heures trente. Kevin, Johan et Anthony ont revêtu leurs combinaisons de « scène » ; jambes bleues, haut blanc avec une manche rayée de rouge et l’autre bleue avec des étoiles blanches. Dans le dos, Vanessa a brodé le prénom de ses frères. « Ça fait pro ! » comme elle dit. Le public est venu en masse. Chantal a passé deux jours à faire le tour des campings et des supermarchés pour annoncer au mégaphone le nouveau spectacle des Voltigeurs Volants, avec un numéro unique, une première mondiale ! La publicité a fonctionné.
Rolland est au micro : « Mesdames et Messieurs, le spectacle exceptionnel auquel vous allez assister vous est proposé par des pilotes professionnels. Les figures qu’ils vont exécuter ont été répétées des dizaines de fois et déjà réalisées, pour certaines, plus de cents fois. Ne tentez pas de les imiter ! Vous risqueriez un accident et peut-être même la mort ! » Les haut-parleurs diffusent une musique de fête foraine saturée que le bruit des moteurs peine à couvrir.
Les numéros s’enchaînent lorsque Rolland annonce le numéro d’évitement avec les trois voitures : « Mesdames et Messieurs, Yohan, Anthony et Kevin vont tenter de réaliser devant vous une figure inédite. Retenez votre souffle car cette action va vous le couper ! » La poussière est à peine retombée que Kevin est déjà retourné au bout du parking. Le public applaudit à tout rompre.
Subitement, un murmure parcourt le public alerté par l’arrêt de la musique. Rolland hésite à annoncer le numéro ; il pense que la répétition du matin était indispensable. Il sait que son fils est bien préparé, mais il sait aussi qu’il ne connaît pas ce parking. Le numéro de Kevin n’est pas vraiment dangereux, mais il réclame beaucoup de concentration et de contrôle. Devant la confiance qu’il lit dans les yeux de son fils, il se décide. Le moteur de la BMW semble ronronner, paisiblement en bout de piste. Rolland reprend le micro : « Mesdames et Messieurs le numéro que va réaliser Kevin est une première mondiale et c’est vous les premiers au monde à le voir. Pour ce numéro, Kevin a besoin de votre silence, mais aussi d’un foulard. Qui va donner son foulard à Kevin ? C’est vous Madame, ou vous Mademoiselle, vous voulez bien lui prêter votre écharpe ? Vous peut-être ? Vous ? Ah merci. On va le poser sur cette boîte, juste devant vous. Elle est propre Mademoiselle, vous inquiétez pas. Kevin m’appelle, Qu’est-ce qu’il veut ? » « Il demande que vous veniez me rejoindre avec votre écharpe. Vous êtes d’accord ? C’est quoi votre petit nom. Sabrina. Mesdames et Messieurs, on applaudit Sabrina »
« Kevin c’est à toi ! Tu peux y aller. » « Sortez vos appareils photos et vos caméras, c’est le moment de filmer. » La BMW s’avance lentement comme un fauve qui concentre toute sa force avant la chasse. Arrivé sur le petit tremplin, Kevin donne un petit coup de volant qui fait basculer la voiture sur ses roues gauches, arrivé devant le public, à la hauteur de la boîte sur laquelle se trouve l’écharpe, il ralentit et s’arrête en maintenant la voiture en équilibre. Il lâche le volant de sa main gauche et ramasse l’écharpe tout en conservant l’équilibre grâce à sa main droite. Sabrina est à quelques centimètres de la vitre baissée. Kevin lui demande de lui bander les yeux avec l’écharpe et de reculer lentement. Elle rejoint Rolland qui demande ce que Kevin lui a dit « Il m’a demandé de lui bander les yeux. Vous vous rendez compte ? Mais y voit plus rien. C’est dingue » Le public retient ce qui lui reste de souffle et seules quelques voix d’enfants, demandant ce qu’il se passe, se font entendre.
C’est alors que Kevin redémarre, envouté par le parfum délicat de l’écharpe de Sabrina, toujours sur les roues de gauche, mais en marche arrière ! « Oui Mesdames et Messieurs vous pouvez croire ce que vos yeux voient, Kevin est en train de décrire un cercle parfait en marche arrière sur deux roues, les yeux bandés ! On n’a jamais vu pareille prouesse. C’est du pilotage artistique. Je vous demanderai de lui réserver un tonnerre d’applaudissement lorsqu’il sera revenu devant la boîte, là devant vous. » Mais le public est tellement stupéfait que personne n’ose rompre le silence et lorsqu’il arrive devant la boîte, Sabrina s’avance et lui dit « Encore un tour. Pour moi, Kevin » Grisé par la réussite de son numéro, Kevin comprend qu’il va falloir faire ce qu’il n’a jamais fait, deux tours en marche arrière, en équilibre sur deux roues, les yeux bandés. Lorsqu’il boucle enfin le second tour, la foule se déchaîne, mais lui n’entend que Sabrina qui crie « Bravo, Bravo, Bravo, Bravo ».
Quand les quatre roues de la BMW sont enfin au sol, Kevin ouvre sa portière, descend lentement et défait le nœud de l’écharpe. Il la tend à Sabrina qui se jette à son cou en lui disant « Garde-la ! Je t’en fais cadeau. Elle te portera bonheur. Bravo. Bravo. »
Le spectacle continue avec le mur du feu, les sauts et le « Monster truck », mais Kevin n’y assiste pas. Il a conduit Sabrina derrière sa caravane. Alors qu’elle l’aide maladroitement à enlever sa combinaison, elle lui glisse timidement dans l’oreille « Toi aussi, c’est ta première fois ? »
*Jean Sunny est un cascadeur français qui a importé des Etats Unis, la cascade de spectacle en France. Créateur de l’équilibre sur deux roues, il s’est rendu célèbre en parcourant de longues distances en équilibre ; La descente des Champs-Elysées, du col de la Faucille ou encore Versailles-Chartres.









